Journal de confinement "Voyages vers l'amour". Jour quarante-quatre

Maintenant, je vais tenter de rentrer un petit peu plus dans le détail de ce que nous sommes, notre arrivée ici après ce grand bond, après ce chaos si précieux. Je vais le faire avec le peu de mots qu'il me reste. Les mots, comme je l'ai déjà dit, n'ont pas passé la barrière, disons que nous ne nous en servons plus. Je vais dire les choses à ma façon, par étapes, car ça me prend de l'énergie de "repartir" vers cet avant. Naturellement, tout ce que je vais raconter là est une histoire vue à travers mon expérience personnelle, vue à travers mon prisme et à travers ma culture d'homme blanc européen.
Il faudra accepter des jours sans paroles, ou presque. Par exemple ce soir, j'ai plein d'images qui se bousculent dans ma tête et l'énergie que ça me prend à les canaliser est énorme. Ce que l'on vit est tellement différent, peut-être qu'en lisant ce récit il ne sera pas pris pour une histoire vraie.
C'est en grande partie pour ça que le langage n'a pas cours ici, les mots ne font pas forcément se comprendre les êtres humains. Les mots, à l'intérieur d'une même langue, d'un même dialecte ont tellement de sens différents.
Une phrase d'avant a été reprise par la source, pour bien nous montrer que le langage n'est rien de simple et qu'il peut être facteur de malentendus "Entre ce que je pense, ce que je veux dire, ce que je crois dire, ce que je dis, ce que vous avez envie d'entendre, ce que vous entendez, ce que vous comprenez... il y'a dix possibilités qu'on ait des difficultés à communiquer". La phrase qui se termine par "essayons quand même", à été transformée dans un énorme éclat de rire par la source en "essayons autre chose". Et le autre chose est arrivé instantanément : la communication sans les mots, par les ondes de couleur. Ces ondes qui viennent du profond de notre être expriment d'une façon claire ce que nous sommes, ce que nous pensons vraiment, notre état de santé physique et psychologique, tout est transparent. Le langage par les ondes a supprimé le pouvoir des mots et de fait, a anéanti toute notion de pouvoir.
Ici, il faut comprendre que le connu à disparu, tout le connu.


Journal de confinement "Voyages vers l'amour". Jour quarante-trois

Les rêves de la vie avant le chaos reviennent de plus en plus souvent. La source nous dit que c'est naturel, ce sont comme des traces gravées sur la fibre optique qui relie les yeux au cerveau, inutile de prendre de l'énergie à vouloir les effacer. Elles sont là et viennent dédoubler les images réelles que mes yeux voient, créant un assemblage hétéroclite quelque part dans la boite crânienne.
Le feu appelle, il réclame des présences, il demande à réchauffer des corps et la nuit peut être fraîche. Nous sommes une dizaine à aller à sa rencontre, je sens son énergie envelopper les corps, une communion s'opère. Nous nous asseyons et nos regards fixent les flammes, écoutant la musique produite par le bois. Nos énergies communes se dressent comme des danseurs se tenant par la main dans une folle farandole. La nuit est déjà intense...


Journal de confinement "Voyages vers l'amour". Jour quarante-deux

De temps en temps, des légères traces de souvenirs remontent et viennent troubler ma présence dans ces intenses moments de vie. Ce ne sont pas vraiment des souvenirs, ça se rapproche plutôt de rêves, toujours en noir et blanc. Ce soir en regardant la voie lactée, une image se projette comme sur un écran, c'est une image que j'avais faite avant le chaos, un assemblage.
Pourquoi celle-là ? L'ambiance, la lumière, l'odeur du parquet, ce pied qui aujourd'hui a une telle importance, cet oeil juste à deviner, ce jean's qui m'a suivi ici, la musique - celle que l'on a envie - que l'on peut entendre dans chaque espace, le goût des choses mangées sur cette table...?
Pour ce soir je vous l'envoie sur ce magnifique ciel étoilé, face à la vallée... la rivière coule en contrebas.


Journal de confinement "Voyages vers l'amour". Jour quarante-et-un

Ce matin, j'ai voulu partir seul faire une marche vers un lieu qui s'est présenté en rêve. Toute la nuit mes rêves m'ont emmené au pays des sens, des cinq sens. Après avoir découvert le sentir, le toucher, l'écoute, le goûter, il me reste la vue. M'est-il possible de voir et de mettre en mouvement les autres sens ? Les enfants nous disent que lorsque les cinq sens fonctionnent ensemble, le sixième s'ouvre comme un arc en ciel pendant l'orage.
J'ai pris la sente tracée, celle qui passe par le col. J'aime cet endroit - j'y dépose à chaque fois des graines - comme une porte. Je ne l'ai encore pas franchie par la droite, ça me laisse découvrir un autre paysage, plus boisé, plus abrupte. La descente se fait rapidement et en bas je vois un marécage où la lumière s'infiltre à travers les arbres. C'est ce lieu que j'ai vu en rêve, ce lieu qui me demande de venir. Une fine rivière serpente entre les arbres, certains sont morts et commencent leur décomposition en laissant tomber leurs branches dans l'eau, formant un barrage naturel, d'où le marécage. De l'écume blanche s'est agglutinée en amont, faisant un reflet particulier. Je suis intimidé d'être là. La tête me tourne un peu, je m'assois sur une souche recouverte de mousse bien verte, une mousse épaisse, douce, accueillante. Je ferme les yeux, je visualise l'air rentrer par mes narines, j'entends le son de la rivière - cette petite cascade en aval du barrage -, mes pieds sont bien ancrés dans le sol et mes mains caressent la mousse. La main droite est appelée par un nombril de vénus qui souhaite m'apporter ses vitamines et je le mets en bouche. A ce moment précis, je sais que je suis là présent, que je vis ce que mon rêve m'a montré : les cinq sens sont attentifs les uns aux autres, il n'y a pas de séparation. J'ouvre très doucement les yeux et ce paysage marécageux, que j'avais trouvé un peu austère en arrivant devient étincelant de lumière, de sons - les oiseaux sont de la fête -, d'odeurs... Pas besoin de goûter pour ressentir, même l'air a du goût, son propre goût. Mes yeux ont du mal à tout capter en même temps, tout est mouvement, jaillissement. Mon coeur bat avec une telle force dans ma poitrine que les larmes sortent pour évacuer ce trop plein d'émotions.
C'est donc ça dont parlent les enfants, être en conscience dans les cinq sens développe le sixième, celui qui est ailleurs, qui arrive dans cette présence. Il ne vient pas du corps et pourtant c'est par le corps qu'il arrive. Il n'est pas corporel, mais peut le devenir. Plusieurs énergies lui sont attribuées, celle de la créativité, de l'intuition, de la mémoire ancestrale, du feu primaire. C'est par lui que l'on passe pour trouver son chemin, sa voix. Il est le symbole de la féminité.



Journal de confinement "Voyages vers l'amour". Jour quarante

Ce soir, je serai court dans le récit, nous avons particulièrement pris contact tout au long de la journée avec le sens du goût et ça demande une présence de chaque instants, oui une concentration. Garder l'équilibre entre l'hémisphère droit et gauche du cerveau, visualiser un fil de cuivre qui relie les deux pour éviter que le gauche ne reprenne les commandes.
Ce sont les enfants qui sont devenus nos enseignants, aujourd'hui. Et ils ont une telle vivacité, tout va tellement vite dans leur apprentissage. Il n' y pas de concurrence, pas de performance, juste de l'entraide. Ils ont une telle complicité avec les plantes, les animaux, le monde minéral, les éléments, les directions. Ils nous pilotent sur l'apprentissage des cinq sens et aujourd'hui pour celui du goût (mais toujours en lien avec les quatre autres), ça a été un festival d'inventivité, de jeux, de montées et de descente de la colline.
Je "goûte" avec délice le sommeil arriver.




Journal de confinement "Voyages vers l'amour". Jour trente-neuf

Et l'ouïe est à l'écoute du toucher.
La source, qui porte la mémoire du temps ancien, nous a raconté cette histoire, cette histoire d'avant le chaos, bien avant le chaos. Elle parle d'un peuple premier, les Cahuillas, qui vivent dans le désert et dans les montagnes de l'autre continent, ils cueillent des plantes avec une connaissance très précise. Ils disent qu'en étant attentif et patient, chacun est en capacité d'entendre les plantes parler*. Cette histoire nous a touché profondément et nous nous sommes mis à écouter. La source nous a prévenu que ce n'est naturellement pas un langage que nous connaissons, mais que nous comprendrons. Nous sommes devenus patients, j'ai eu du mal au départ. Et puis d'autres sont venus me montrer que si je touche les plantes, pour être plus précis, si je dirige mes mains vers les plantes, elles émettent un son. Chaque plante à sa propre fréquence, ce qui fait qu'avec de la pratique je peux communiquer avec plusieurs d'entre elles. Ce sont des vrais moments de grâce, les larmes de joie sortent souvent dans ces instants. La pensée n'est pas là, c'est une expérience directe de communication entre les êtres.
Ces pratiques se sont rapidement étendues vers le monde animal et minéral. Il est des moments magiques lorsque les volutes d'énergies et les sons des différents mondes s'offrent aux sens de la vue et de l'ouïe. C'est devenu notre façon de vivre et ça demande une conscience de tous les instants, ce qui nous rend si rayonnants, si présents.
Quelques fois nous ressentons la faim, ce sont les plantes qui s'en aperçoivent en premier, ce sont elles qui se proposent de nous nourrir, elles nous invitent à nous rassasier.
Et l'ouïe développe le goût.

* Gary Snyder Le sens des lieux. Ethique, esthétique et bassins versants, page 56, paragraphe "Le yogi et le philosophe".






Journal de confinement "Voyages ers l'amour". Jour trente-huit

Ce sont les sources qui ont demandé la présence du feu à leur côté. C'est une demande qui a été faite le jour de la grande brume, lorsque les volutes de couleur se sont rencontrées. Les sources disant que l'énergie du feu est bénéfique à celle de l'eau. Ici, il est placé à l'aval, juste à coté des céramiques recevant les offrandes. Il est permanent, gardé par les êtres humains qui se relayent pour l'alimenter, les animaux se tiennent légèrement à distance.
Le feu réchauffe les corps et développe le sens du toucher, mais sa fonction principale est bien d'être relié à la source, comme deux amants inséparables. En fait ici, rien n'est séparable, chaque particule est en communication constante avec une autre, avec les autres, toutes les autres.
La terre, le vent, l'eau, le feu, les quatre directions, le vide, jouent, chantent, vibrent, dansent... dans - pour un oeil non averti - un ballet foutraque, où les volutes colorées croisent des auras sonores. Un opéra jamais écrit car toujours changeant, surprenant, virevoltant. Une ode gratuite, commune, sans histoire, sans vainqueur... une ode à la vie.
Assis dans l'herbe, regardant toute cette beauté, tout cet invisible, les animaux et nous avons commencé à caresser l'herbe. Le feu développe vraiment le sens du toucher.



Journal de confinement "Voyages vers l'amour". Jour trente-sept

La vue sur la source en venant du col est surprenante. Un groupe chante en cercle quasiment parfait, d'autres s'affairent à proximité, déposant des offrandes - fruits, fleurs, petites pépites trouvées sur les chemins - dans des céramiques que des artistes ont fabriqué spécialement. Une zone argileuse tout près s'est proposée à la transformation par le feu. 

Depuis le chaos, toutes les sources sont des communs, pas des biens communs, des communs. 
Plus rien n'appartient à personne, alors les sources... 

D'ailleurs nous n'y venons pas pour boire, mais pour rendre visite, pour prendre soin. La source voit si nous avons besoin de son eau, et si c'est le cas, le coeur de l'être humain s'ouvre à la réception du cadeau. Le sens du goût se développe. 

Chaque être vivant, en conscience, est gardien des communs, les sources sont honorées nuit et jour, jamais seules. Les animaux ont toute leur place, mais les nuits de nouvelles lunes, leur présence est plus accentuée. 

C'est par un chant, un jour de brouillard, qu'elles ont demandé à être accompagnées. Ce sont les arbres les premiers qui ont répondu, puis les plantes, les pierres étaient déjà là. Les animaux et nous, sommes arrivés ensemble, par des voies différentes. Des volutes d'ondes colorées, sont sorties au-dessus de chaque être et la discussion a eu lieu. 
Je vois encore cette buse venir par l'ouest, passer au-dessus de la source et se faufiler entre les volutes, sans troubler un seul instant la communication.


Journal de confinement "Voyages vers l'amour". Jour trente-six

La nuit a été rêveuse, je me réveille saoul de sommeil. Quelques pas dans l'herbe pleine de rosée et je sens toute la vibrance intérieure du corps, tout se met en route. Le fait de passer de la position horizontale à la verticale fait réagir toutes les mémoires ancestrales, les sens se réveillent. Ces fameux cinq sens qui sont apparus à tous, après le réveil, après le chaos. Chacun d'entre nous les avons ressentis, vécus, en même temps, comme un choc, comme une découverte de l'existence du corps.
Rien d'agréable ou de désagréable, juste vivre avec le vivant, juste sentir l'air rentrer par les narines - ce matin, plus frais que celui qui vient de sortir - passer par la gorge, par la trachée et rentrer dans les poumons, visiter le coeur, passer tranquillement le plexus solaire - bienheureux de sentir la température extérieure - et ressortir informer le dehors de la vibration interne. Un système parfait, presqu'automatique, devenu conscient.
Comme je l'ai déjà dit, mais c'est important de le répéter, le souffle règle nos pas.
Et le moyen de nous déplacer est la marche.
Avec quelques autres, nous partons voir la source, retrouver les autres sens...



Journal de confinement "Voyages vers l'amour". Jour trente-cinq

Aujourd'hui, je me suis assis au bord de la rivière. Et puis je suis rentré au camp de base, sans avoir rencontré un être humain. Un corps féminin, nu, s'est présenté là devant. La carte postale a traversé le chaos, une photo d'Irving Penn, ses superbes tirages au platine, peut-être ça qui l'a gardée intact. L'abeille n'a pas survécu, pourtant ses ailles argentées dans la lumière faisait penser qu'elle s'envolerait dans l'instant. Gary était penché par-dessus sa machine à écrire, le magnétophone prêté par Burroughs déconnait, et Gary écrivait sur les expériences sonores et de cut-up, collage et de montage de Bill. Un feuillet dépassait de la machine "La voix insistante, chamanique, doctorale et cabotine de Bill Burroughs ainsi que sa médecine douteuse et amère auront sans aucun doute un effet très bénéfique sur vous."
Je me demande comment va M. Snyder. Gary était là, mais pas là bien entendu, il doit faire partie d'un groupe la-bas. Nous ici, notre groupe s'est formé au gré des marches, des déplacements, il n'y a pas de connu, pas de souvenirs, nous sommes. Avons-nous des noms, des prénoms ? Personne ne pense à ça, nous n'avons pas besoin d'identité supplémentaires, nous sommes. Pas de paroles, la communication se fait par ondes de couleur.
J'ai subitement envie de mettre la cassette de Burroughs, parait que l'effet est déroutant et "érotique".

Journal de confinement "Voyages vers l'amour". Jour trente-quatre

C'est après, c'est le monde d'après. Nous sommes sans arrêt en déplacement, tout a été déconstruit. La marche est le seul moyen de transport. Plus personne ne pense à ce qu'a été le monde d'avant, plus personne ne pense à travailler, tout du moins le travail consiste à vivre, à bouger, à aimer, à marcher, à découvrir. Personne ne sait ce que sera demain, d'ailleurs ce mot n'a plus de signification. Toutes les valeurs ont été balayées, ce qui compte c'est la vie, comment vivre le maintenant, comme juste après une naissance sans famille, d'ailleurs ça non plus ne veut plus rien dire - la famille. Cette idée d'être élevé par ceux qui nous ont conçu a disparu, comme le reste, instantanément.

Actuellement, nous sommes un groupe et nous allons rejoindre, en passant par la montagne, un lieu dont quelqu'un a dit qu'il s'y passe des choses, des choses fortes.
En fait, le moteur de la vie est devenu celui-là : rechercher les lieux où une communication avec la nature est facilitée. Des sources, des pierres, des montagnes, des grottes, des ruisseaux...
Tout est devenu simple, ce virus a fait énormément de morts, mais rien par rapport à ce qui s'est passé ensuite. Bizarrement nous ne savons plus très bien ce qui s'est passé réellement, comme si nous avions sauté collectivement dans un autre espace, une autre dimension. Nous avons désappris très rapidement tous les gestes, sauf les plus primaires : marcher, observer, contempler. Manger, boire, s'habiller ne sont plus des notions vitales, nous mangeons et buvons lorsque nous avons faim et soif, et surtout lorsque le nature nous offre les choses.
Il n'y a pas de chef, ni de chèfe, chacun est responsable de lui-même. S'il y a quelque chose qui ne va pas, la "faute" n'est pas recherchée chez l'autre mais chez soi, dans son propre comportement. L'autre, n'importe quel autre, est devenu une autre partie de nous-mêmes. Dire ou faire du mal - ou du bien - à l'autre revient à dire ou faire du mal - ou du bien - à soi-même. C'est arrivé comme ça, d'un coup, spontanément.
La nature a une puissance énorme, nous la respectons à tel point qu'un caillou dans une sandale devient un ami qui arrive pour nous masser un point qui doit être massé, lorsque c'est un peu trop fort, nous l'enlevons et le déposons délicatement, respectueusement sur le bord du chemin.
Tout est à la bonne cadence, comme en osmose avec notre respiration.
Le souffle règle nos pas.


Journal du confinement "Voyages vers l'amour". Jour dix-neuf

"L'expérience nous montre que la crasse, derrière le rêve, est souvent ce que nous cherchions au départ. Quand notre pensée cherche refuge dans le blanc et le noir, nous passons à côté de l'énergie que procure la vie et l'art.
Nous ratons l'ivresse de la danse et de l'inconnu.
Nous échangeons la beauté de l'imprévisible contre la promesse banale de se débrouiller comme nous l'avons toujours fait. Les choses vraiment intéressantes arrivent dans l'espace vide entre ces deux opposés, quand nous nous laissons dériver et regardons au-delà de ces murs.
La vue est sublime et ne ressemble à rien de ce que nous connaissons."

Chris Eckman. Auteur compositeur du groupe Walkabouts.
Tiré du livre de Catherine Viale et Mathieu Moreau It's not only rock&roll
Entendu dans l'émission Eldorado Errance #135 : de Tarnation à R.E.M.
http://www.radio-eldorado.fr



Journal de confinement "Voyages vers l'amour". Jour dix-huit

étonnant, ces soirées passées à compiler une journée
des captures de jour qui s'assemblent la nuit
l'ombre et le blanc
le noir et la lumière
     - équipe
tout s'imbrique
je suis tout ça
une mémoire
     - sans mémoire